Interview : Téo Saavedra 2008

Interview : Téo Saavedra 2008

C’est en exilé politique que Téo Saveedra est arrivé en France, en 1977. Tour à tour acteur, réalisateur, musicien, documentaliste et écrivain, il crée avec Christian Iaconno, le premier Festival des Nuits du Sud en 1996. A quelques jours à peine de l’ouverture du Festival et alors que la pression dans les bureaux des organisateurs commence à monter, que chaque minute de ce « chef d’orchestre » haut en couleurs est comptée, Téo nous a accordé de son temps pour réaliser cette interview afin de nous raconter l’histoire d’un des plus importants festivals de musique de France.

N athalie Paulin : Racontez-nous, Téo, comment tout cela a commencé. D’où vient l’idée de créer le Festival des Nuits du Sud ?
Téo Saveedra :  L’idée vient de Christian Iaconno. Moi, j’adore faire la fête, et à l’époque, j’organisais de grosses soirées à la maison. Je faisais venir des groupes cubains, il y avait beaucoup de monde et on s’amusait bien mais, systématiquement, la Police intervenait et interrompait mes soirées. Un jour, Christian (Iaconno), qui avait fait la fête avec nous la veille, me dit : « j’ai une idée : on pourrait faire venir tes amis musiciens et faire la fête dans la ville… » Et c’est comme ça que tout a commencé. Dès 1996, nous organisions les premières Nuits du Sud avec entre autres groupes – et avant même que le film qui les a fait connaître du grand public ne sorte- les Buena Vista Social Club qui ont largement contribué à la réussite du Festival. Ils ont été présents, depuis, chaque année et je tiens vraiment à le souligner car c’est aussi grâce à eux que nous avons réussi à ce que le Festival connaisse aujourd’hui un tel succès.

N.P. : Comment faites-vous pour trouver les groupes du Festival ?
T.S. :  Les quatre premières années, nous allions parcourir le monde pour dénicher des artistes locaux. Aujourd’hui, 80% des artistes viennent d’eux même. Il est important de comprendre que c’est très compliqué et bien sûr extrêmement coûteux de faire venir des artistes. Le moindre petit détail fait l’objet de négociations interminables. Et puis il y a toute l’organisation : billets, visas, hébergement, charges salariales etc. C’est vraiment impossible à gérer. Aujourd’hui, les tourneurs deviennent incontournables. Ils nous facilitent considérablement le travail. Ils s’occupent de toutes les questions administratives, font des partenariats avec les autres festivals de manière à diminuer les coûts et nous font simplement signer des contrats de vente. 
Il y a la réalité financière. Moi, j’ai des tas d’envies et projets, mais il faut financer tout ça. On ne peut pas demander aux Nuits du Sud d’être un Festival populaire, de ne pas coûter trop cher à la Ville et nous faire sans arrêt des tas de reproches. Nous sommes là pour organiser un Festival de musiques du monde, pas pour vendre des chaussures… On ne peut pas faire n’importe quoi et il faut arrêter d’attendre tout et n’importe quoi de nous. Le Festival doit rester ce qu’il est. Vence ne peut pas non plus accueillir 6000 personnes tous les soirs !

N.P. : Quels sont vos critères de sélection dans le choix des musiques et des groupes ?
T.S. :  Mon tout premier critère est tout simplement de « faire aimer la musique que j’aime. » Prenons l’exemple de quelqu’un qui vient voir Sergent Garcia en première partie de soirée, lui faire découvrir les extraordinaires percussionnistes japonais… Et puis les Nuits du Sud, c’est aussi et surtout une ambiance, une rencontre, un partage, un moment de sympathie. On ne vient pas ici s’assoir  voir un concert, puis repartir. Les gens viennent passer un bon moment, souvent manger à une terrasse, en famille ou entre amis, c’est très convivial.

N.P. : Certains parlent des « nuisances » des Nuits du Sud…
T. S. :  La musique, ce n’est pas du bruit ! Même si on n’apprécie pas, il ne faut pas oublier qu’il y a des gens derrière. Je m’insurge contre le mépris et une sorte de désinformation.

N.P. : Après les Nuits du Sud, vous avez décidé de créer les Jours du Sud. Quel en est le concept ?
T.S. : L’idée des Jours du Sud, c’est de créer des liens, des complicités avec l’ensemble des vençois, dans le même état d’esprit que ce qu’on fait le soir. Cette année, 40 artistes vençois se mobilisent pour créer une œuvre pour le Festival.
Les Jours du Sud auront lieu les 17, 24 juillet et 2 août et sont suivis des « Talents Unisys ».

N.P. : Quelques pistes pour la programmation 2009 en avant première ? …
T.S. :  Aujourd’hui je pense à la réussite de ce Festival mais j’aimerais vraiment arriver à faire venir Manu Ciao. Et puis j’aime la chanson française et je pense à des gens comme Cabrel… en même temps, il faut garder les pieds sur terre.

N.P. : Un mot pour conclure…
T.S. :  J’aimerais que le Festival soit le pilier d’un lieu des arts à Vence et que Vence devienne un espace permanent des arts. Mon rêve serait d’avoir une salle de spectacle digne de ce nom pour la musique et pour tous les arts. 
Aujourd’hui, je pense que le Festival est équilibré avec des soirées importantes et d’autres moins et moi, je suis vraiment fier d’être à sa tête depuis toutes ces années. Bien sûr, on se remet constamment en question. On essaie de comprendre, d’évoluer et d’apporter toujours de nouvelles choses pour dynamiser la Ville.

Téo, un grand merci pour ce temps passé avec nous ! Un énorme travail vous attend encore avec cette nouvelle édition et nous vous souhaitons à tous une grande réussite et longue vie au Festival !

Propos recueillis par Nathalie Paulin
Interview préparée par N.P.L.R.

 
Creation de site Web
Smileway