Le liseur

Le liseur

Le liseur (The Reader de Stephen Daldry) : Amour, nazisme et culpabilité dans l’Allemagne de l’après-guerre.

Dans le Berlin de l’après Seconde guerre mondiale, un jeune lycéen, Michael Berg, découvre l’amour grâce à Hannah Schmidt, contrôleuse de tramway célibataire (interprétée par Kate Winslet). Leur relation, après une rencontre un peu curieuse sera très forte tout d’abord sur un plan sensuel : le jeune homme a en ce domaine tout à découvrir. Mais très vite s’installe entre les deux amants un curieux rituel. Avant de faire l’amour, le jeune homme doit lire à sa maîtresse de longs passages des grandes oeuvres qu’il étudie : l’Odyssée ou Goethe par exemple. Le film reconstitue remarquablement l’ambiance de l’Allemagne d’après-guerre et la première partie du film est particulièrement réussie. Puis, brusquement, l’histoire d’amour prend fin. Le jeune homme, qui a beaucoup de mal à s’en remettre, devient un brillant étudiant en droit, et à ce titre se voit contraint de suivre le procès de gardiennes de camp nazies. Sur le banc des accusées : Hannah Schmidt. La deuxième partie, plus décousue, mêle le passé et le présent : le procès, la prison, la suite de leur relation, la poursuite par d’autres voies l’étrange activité de « liseur » de Michael, qui devenu un homme est incarné à l’écran par Ralph Fiennes.

Le film de Stephen Daldry (The Hours, Billy Elliott) adapte très fidèlement le roman de Bernhard Schlink (paru depuis en Folio), best seller dans le monde entier en 1995. Les acteurs sont remarquables à commencer par Kate Winslet qui hérite à

nouveau (après les Noces rebelles) d’un rôle superbe, un rôle à oscars… Deux petits bémols cependant : la vo est en anglais ce qui est dommage (et ça l’est encore plus de faire jouer le grand Bruno Ganz - La Chute - acteur germanophone en anglais). Et l’on ne parlait pas anglais dans la RFA des années 60. Pour une fois que la VF se justifiait, le film est surtout distribué en VO… Par ailleurs, le film se veut (comme le livre) une réflexion sur la mémoire et l’héritage nazi dans l’Allemagne de l’après-guerre. Pourtant, sans dévoiler le secret du film, il repose sur des postulats curieux et historiquement faux. Le régime nazi n’était pas inculte, au contraire : Wagner et Beethoven régnaient dans les salles de concert, le plus grand philosophe allemand (Heidegger) était au service du régime, une majorité de médecins très cultivés se sont mis au service de la barbarie nazie. Enfin l’alphabétisation--régime totalitaire oblige- était très poussée… Ceci n’enlève rien au mérite de cette histoire puissante et romanesque, et l’on aura du mal à oublier Kate Winslet écrivant une belle lettre à son ancien amant….De plus, la plongée dans les coulisses judiciaires de la RFA est d’autant plus réussie que l’auteur du roman est lui-même juge.

BORIS FICHOU

 
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